Naive New Beaters
Un grand bain à bulles multicolores. Un dance-floor sous les boules à facettes. Une avenue sous les palmiers. Voilà dans quoi nous transporte, dès ses premières mesures, le nouvel album des Naive New Beaters.
Enregistré entre Paris et Los Angeles, Fun Hours a beau sonner de la manière la plus spontanée qui soit, il a pris plus de deux ans de travail à David Boring (chant), Eurobelix (claviers) et Martin Luther BB King (guitare). Pendant la tournée de l’album précédent, A La Folie, le groupe décide de surfer sur leur énergie pour prendre, ici et là, une semaine de coupure consacrée à l’écriture de nouvelles chansons. « La composition s’est faite sans pression et avec le mood positif des concerts, raconte Eurobelix. Il y a eu moins de concessions entre nous, qui avons des goûts musicaux différents d’habitude, ou, en tout cas, elles ont été plus faciles. » Après plus de dix ans de groupe, les trois musiciens sont en effet plus soudés que jamais. Leur secret ? Une amitié indéfectible. « Fraternelle, d’après David Boring. On essaye toujours de maintenir le groupe comme une autre personne. On est pote avec lui ! »
Cette passion pour la musique cultivée, le trio la cultive dès ses années lycée. Depuis un premier EP aussi ludique qu’enthousiaste, Bang Bang (2007), le trio a tenu ses promesses publiant Wallace (2009), La Onda (2012) et A La Folie (2016). Le quatrième venu, Fun Hours donc, en constitue la suite logique : « on a repris l’essence de ses titres les plus forts en mettant de côté ce qu’il y avait de plus dur ou saturé, commente Martin Luther BB King. Nous voulions des basses groovy, des guitares sèches, sans ampli, pour un son direct et sans artifices. Bien que très produit, Fun Hours devait être primaire, efficace, dynamique. C’est un bonbon coloré qui colle aux dents… on ne s’en débarrasse pas si facilement. »
Dont acte. S’ouvrant sur l’électro-pop chorale du morceau éponyme, Fun Hours balance de la pop romantique d’obédience eighties (« Holding Love »), un « Addicted to Joy » hédoniste et funky, la synthpop naïve de « I See Fire », la pop à la fois scintillante et réconfortante de « Dope », celle, plus narrative, de « Fireman », les rythmiques claquantes de « Keep Runnin’»… Il y a aussi le folk grunge cerné par un « everybody say yeah » chanté en chœurs, « One Way to Go », qui affirme la volonté du groupe de favoriser les voix féminines. « Les chœurs portent bien leur nom… C’est du baume au cœur », comme dit David Boring, qui a signé les paroles de l’album évoquant « l’amour, le partage, le temps qu’il faut pour savourer l’instant présent » : « A La Folie faisait suite à une triple rupture sentimentale. C’était un disque plus nerveux, vindicatif. Fun Hours raconte l’après, quand on réalise qu’il faut profiter des beaux moments. Malgré l’environnement actuel où on a l’impression de courir vers l’apocalypse, il faut être heureux, prendre de la distance vis-à-vis du chaos. »
D’où ce titre mantra, Fun Hours. Ici, la soul et le disco sont beaucoup plus explorés que jadis. « On a délaissé notre côté punk, confirme Eurobelix. Notre musique est plus ensoleillée, plus pop encore, plus dansante, plus accessible. » Impossible, en effet, de ne pas trouver son compte dans l’un des morceaux de l’album, qui a bénéficié de l’intervention de musiciens extérieurs, histoire d’apporter un nouveau souffle au fonctionnement interne du groupe, et des apports vocaux de JeanJass et Ana Zimmer. Malgré ses variations de tempos, Fun Hours témoigne d’une cohérence jusque-là inédite chez les Naive New Beaters. L’ensemble brille autant par sa contemporanéité que par son sens du rétro, entre seventies et années 80. Ses influences principales ? Les grands espaces, l’été qui ne finit jamais, le cinéma, la tolérance… Et la Californie, terre d’enfance de David Boring inscrite dans l’ADN du groupe, où ils ont tourné le clip de « I See Fire ».
« Fun Hours reflète la société actuelle de l’immédiateté, le refus de la tragédie… Tel l’orchestre sur le Titanic, qui a joué jusqu’à ce que le bateau coule entièrement », analyse Martin Luther BB King. Oublier la noirceur de l’avenir, les regrets du passé… Même si la conclusion du disque, le fascinant « Today’s Mood », s’avère plus introspective et cérébrale. Certes, la fin de la récréation s’approche mais avant, on aura profité de la vie comme jamais. Let’s dance !
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